Exposition So British

La Gacilly (Morbihan) jusqu’au 5 octobre


« Ce n’est donc pas un hasard, en ces temps tourmentés, si nous avons voulu accueillir sur nos terres bretonnes le regard décalé de nos cousins d’Outre-Manche qui savent si bien croquer notre époque, avec humour parfois, avec acidité souvent, avec lucidité toujours. Fascinante Angleterre. Nous allons souvent chercher l’exotisme bien loin. Il est peut-être plus proche qu’on ne le croit. Juste au nord de Douvres, par-delà les falaises. Entre la France et la Grande-Bretagne, c’est une longue histoire de mille ans, faite de malentendus et d’inimitiés, d’admiration et de respect. Sans doute parce que les Britanniques ne font rien comme les autres, surtout pas comme nous : ils roulent à gauche, ils ont leur propre monnaie, ils votent le Brexit, ils jouent aux fléchettes, ils croient aux fantômes et ont encore une monarchie. Et c’est probablement pour tout cela que nous les aimons. Ils ont leur singularité, leur créativité propre et ce brin d’excentricité qu’ils développent même dans les situations les plus sombres. Car au pays des costumes sobres et de l’éducation rigide, l’extravagance se cultive comme un art. Depuis Oscar Wilde, qui promenait un homard en laisse sur les quais de Londres, on sait que cette propension à défier l’entendement n’est pas nouvelle. Winston Churchill savait manier les mots et les calembours comme autant de piques pour ses adversaires. Les Monthy Python ont érigé l’humour loufoque et provocateur en véritable œuvre d’art, osant, ô sacrilège, tourner en dérision la vie du Christ ou celle, héroïque, du légendaire roi Arthur. Quant à George Brummel, « le roi de la mode », il passait quarante-cinq minutes à nouer sa cravate. À la fin de sa vie, exilé à Paris et harcelé par les créanciers, il donnait des réceptions imaginaires dans sa chambre de bonne, annonçant lui-même les invités fantômes dans la pièce vide. Les Beatles, les Rolling Stones ou même les Sex Pistols ont dynamité les mœurs mais ont toujours été de loyaux sujets de Sa Majesté. L’épopée anglaise regorge de ces personnalités qu’on juge déraisonnables ailleurs, mais qui, pour un Britannique, participent à l’identité d’un pays où le principe unificateur de la Couronne a toujours laissé place à la possibilité de se singulariser. Car l’irrévérence sert aussi l’idéal de la liberté. »

Plus d’information

Cyril DROUHET
Commissaire des expositions du Festival Photo La Gacilly

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